Éloge au chocolat chaud

Quand vient l’hiver,
que la bise glaciale vous fouette les joues,
ou bien que vous soyez amoureux ou malheureux,
que ce nectar est doux !

Remède ou philtre d’ amour, au coin du feu, ceux qui s’y abreuvent deviennent chaleureux,
y compris les plus frileux.

Sa mousse onctueuse dilate les papilles et délie les langues.
Les malheureux vident leur chagrin et les amoureux s’embrassent.

Chacune de ses cuillerées nous redonnent vigueur et quand il ne lui reste qu’une seule goutte, alors voilà qu’il laisse une empreinte sur le duvet de nos cœurs.

Si Gavroche était une fille

Si Gavroche était une fille,
Voici à quoi elle ressemblerait.

Un.e titi.te parisienne au regard éveillé,
Au visage rusé, au chapeau dépecé,
Puis aux pieds déchaussés.

Petite fille dégourdie
Que l’on aimerait aussi.
Elle aussi serait tout un poème
Et dans aucun pays non plus, il n’y aurait de même.

Elle aussi aurait dansé et chanté :
« Je suis tombé par terre, c’est la faute à Voltaire.
Le nez dans le ruisseau, c’est la faute à Rousseau »
Elle aussi aurait été révolutionnaire.
Elle aussi aurait tiré sur les nantis,
Mais de ses yeux revolver.

Ma ville

Une larme, puis un sourire esquissé,
Paris, que tu m’avais manqué.

Et ton ciel recèle dans cette flaque de narcisse
Des histoires anciennes qui ressurgissent.

Ville bien-aimée, détestée
Même trahie, puis retrouvée,
Dont chaque avenue, passage et ruelle
Cachent ô combien de secrets éternels.

Ces pas sur tes pavés dans mes plats souliers,
Sentant te dérober quand je m’approchais un peu trop près
D’un recoin peu familier, et y voyais tantôt un je t’aime,
Écrit à la hâte par quelque Roméo anonyme,
Tantôt une statue ou une peinture sublime.

L’homme à la sacoche

Une mallette à la main, d’un pas décidé, un homme marche. Il a l’allure d’un homme qui sait où il va. Sa décision a été mûrement réfléchie. Il l’aperçoit au loin, au fond du passage, le crâne dégarni, portant une chemise blanche. Comme sur la photo. Quel meilleur endroit que ce passage presque désert en pleine journée pour entreprendre son projet! Un seul client, parfait ! L’affaire sera vite menée. Son regard est fixé sur l’objet de sa visite. Des plantes des vitrines alentours s’évaporent un parfum trop lourd qui commence à l’étourdir. Lui, un homme de son rang, tomber pour une plante! Le souffle court, il se ressaisit, il l’avait déjà fait et tout s’était bien passé. Pourquoi alors un soupçon d’inquiétude l’envahissait-il? Et si jamais il s’était trompé ? D’un revers de la main, il chassa ses mauvaises pensées. Il arriva en face de son homme, crispa chacun des doigts de la main, la lui serra avec vigueur et lui dit: “Bonjour, je viens pour acheter. Votre café est-il toujours à vendre?”

Love

Lovée au creux du plus doux des couffins
Louer ciel et mer au plus loin des confins de la terre
Litanie resplendissante de mes soucieux desseins

Opuscule minuscule de l’amour érudit
Opercule ridicule d’un corps en sursis
Oscule peureux exhalant nos folles vies

Vies boisées d’amants intermittents
Vols d’oiseaux migrateurs de mon cœur au tien
Vers d’indéfinissables rivages, ou d’éventuels mirages

Eternelle connection de nos âmes, ou simple lien passager,
Evidence de nos pas assemblés, et pourtant le doute s’immisce.
Et si jamais, et si jamais.